Lors de l’événement du 3 décembre, l’accent a donc été mis pour une fois sur le dialogue avec les scientifiques. Des expertes et experts renommés de l’ETH Zurich ont présenté le potentiel de différentes technologies et les évolutions attendues – mais aussi leurs limites et les incertitudes qui subsistent.
La cinquantaine de participants présents à l’événement ont fortement apprécié les possibilités d’échanges directs avec des scientifiques de premier plan – de nombreux participants ont souligné le besoin d’être mieux informés sur ce qui est techniquement possible et ce qui ne l’est pas.
Reto Knutti de l’ETH Zürich a pointé la difficulté ainsi : « En Suisse, nous n’avons pas de problème de connaissances, pas de problème de technologie, mais un problème de mise en œuvre. » CEO4Climate aide les dirigeants d’entreprise à aborder ce dernier problème.
Photos: Valentin Müller
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Key Community Insights des échanges d’expérience
- Du point de vue des sciences du climat, atteindre l’objectif zéro net est absolument essentiel.
- De l’avis de l’ETH, il est possible de réaliser l’objectif zéro net tout en garantissant la sécurité de l’approvisionnement et un approvisionnement énergétique à un coût acceptable pour l’économie.
- Selon les expertes et experts de l’ETH, la Suisse dispose du potentiel pour être un modèle en matière de protection du climat pour les autres pays et profiter sur le plan économique de son rôle de précurseur.
- Les thèmes abordés, à savoir le stockage, les courbes d’apprentissage des nouvelles technologies, la décarbonation de l’industrie, l’économie circulaire, l’élimination du CO2 et l’intelligence artificielle, sont tous déterminants pour pouvoir mettre en œuvre l’objectif zéro net.
- Le dialogue entre les responsables économiques et les scientifiques répond à un besoin majeur, de nombreux représentants et représentantes d’entreprise cherchent en effet à être mieux informés sur le potentiel des nouvelles technologies. Les demi-vérités dont les médias se font régulièrement l’écho créent une insécurité.
Un approvisionnement en électricité et un stockage fiables
Interactions entre les énergies renouvelables et le stockage, rôle de l’hydrogène
Community Insights
La décarbonation conduit à une augmentation significative de la consommation d’électricité car l’approvisionnement en chaleur, les transports et des secteurs importants des processus industriels doivent être électrifiés. Différentes études de l’ETH montrent que ces besoins supplémentaires en électricité peuvent toutefois être couverts de manière tout à fait fiable et avec de surcroît une pertinence économique – y compris pendant les mois d’hiver. À cet égard, l’ETH estime que les facteurs suivants sont importants :
- Permettre et imposer la flexibilité (tarifs, etc.)
- Permettre l’innovation (de l’ouverture du marché jusqu’au client final)
- Encourager les investissements (environnement sûr, procédures efficaces, communication claire) et accélérer ainsi le développement
- Assurer l’intégration internationale de manière efficace et efficiente
Executive Director Energy Sciences Center ETH Zürich
Courbes d’apprentissage des nouvelles technologies
Community Insights
Les entreprises sont confrontées à un choix difficile s’agissant des technologies dans lesquelles elles doivent investir pour atteindre zéro net. On ne sait pas quelle sera l’évolution des prix des technologies ni quelles seront les technologies qui s’imposeront à long terme. Les résultats des recherches de Tobias Schmidt montrent que les courbes d’apprentissage des technologies – c’est-à-dire le processus par lequel les technologies deviennent plus efficaces et leur coût diminue dans le temps – dépend de la complexité de la technologie concernée et de son degré de standardisation. Il est donc recommandé aux entreprises de s’orienter autant que possible vers des technologies simples et susceptibles de faire l’objet d’une utilisation de masse.
Professeur et directeur de l’Institute of Science, Technology and Policy ETH Zürich
Décarbonation de l’industriel
Évolutions et enjeux technologiques du futur
Community Insights
La décarbonation de l’industrie est un enjeu majeur car aujourd’hui, dans le domaine des processus à haute température, beaucoup d’applications fonctionnent au gaz. Parallèlement, les pompes à chaleur ont un potentiel énorme : il existe déjà à l’heure actuelle des pompes à chaleur qui produisent de la chaleur jusqu’à 160°, et la recherche travaille maintenant sur des pompes pouvant produire de la chaleur jusqu’à 200°. Une standardisation plus importante permettra de réduire encore les coûts. De toutes nouvelles possibilités apparaissent, combinées au refroidissement et extrêmement flexibles.
Les combustibles synthétiques (y compris l’hydrogène), en raison de leur faible rendement dans le bilan global (tonne de CO2 économisée par MWh d’énergie), ne doivent être utilisés que lorsqu’il n’existe pas d’alternatives et qu’une électrification directe n’est pas possible. Le captage du dioxyde de carbone dans l’air (direct air capture) est souvent même plus efficace. En d’autres termes, sur le plan énergétique, il est plus efficace d’exploiter une application avec des carburants fossiles et de capter le carbone que d’utiliser directement des combustibles synthétiques.
Le choix des bons fournisseurs constitue un autre levier important pour la décarbonation de l’industrie. Lorsqu’on utilise des polypropylènes (plastique), les émissions peuvent varier jusqu’à 90 % selon les producteurs. Ces données ne sont cependant pas encore suffisamment disponibles aujourd’hui. Des startups et des responsables politiques ont engagé des actions (exemple : empreinte des produits dans l’UE) pour accroître la transparence des données.
Professeur ETH Zürich
Élimination du CO2
Quelles sont les approches qui ont réellement un potentiel de passage à l’échelle ?
Community Insights
Il est évident que l’élimination du CO2 est déterminante pour pouvoir atteindre l’objectif zéro net. En même temps, il faut encore une fois insister sur le fait que la priorité doit être donnée à la réduction des émissions. D’une part parce qu’elle est en général moins coûteuse, et d’autre part parce que le potentiel d’élimination du CO2 est également limité. En investissant dans des technologies encore coûteuses aujourd’hui, les entreprises qui poursuivent un objectif zéro net peuvent apporter une contribution importante au changement d’échelle et renforcer ainsi leur propre crédibilité. Pour la Suisse, ce nouveau secteur économique de l’élimination du CO2, en forte croissance, constitue également une grande opportunité. 8,8 % des emplois dans le secteur de l’élimination du CO2 dans le monde sont déjà implantés en Suisse.
Scientifique du climat ETH Zürich
L’intelligence artificielle, un levier pour zéro net
Comment l’IA peut accélérer la réalisation des objectifs zéro net
Community Insights
L’intelligence artificielle n’entraîne pas uniquement un accroissement de la consommation d’électricité, c’est aussi une technologie qui offre beaucoup de nouvelles possibilités pour économiser le CO2. Accenture et swisscleantech ont réalisé ensemble un livre blanc qui montre comment l’IA peut contribuer concrètement à atteindre les objectifs climatiques. Il est question notamment de la simplification de la collecte de données pour le reporting, de la gestion des bâtiments ou du dialogue avec les collaboratrices et collaborateurs sur des thèmes relatifs à la durabilité via des chatbots.
La discussion avec les participantes et participants à la breakout session a montré que l’utilisation de l’IA suscite beaucoup d’intérêt et a du potentiel ; mais les principaux leviers – notamment l’électrification de la flotte de véhicules ou le remplacement des systèmes de chauffage fossiles – devraient malgré tout être traités en premier.
Co-directeur swisscleantech
Technologies pour la mise en place de l’économie circulaire
Internet des objets, fabrication additive, technologies de recyclage – situation et potentiel
Community Insights
L’économie circulaire n’est pas uniquement synonyme de potentiel important de réduction des émissions de CO2, elle est aussi cruciale pour atteindre l’objectif zéro net. De nombreuses technologies clés sur lesquelles s’appuient des modèles économiques circulaires sont déjà disponibles à l’heure actuelle, mais elles sont souvent insuffisamment utilisées, par exemple l’Internet des objets, la fabrication additive ou l’impression 3D, mais aussi les jumeaux numériques (digital twins) ou les nouvelles démarches de recyclage.
Il y a eu aussi quelques avancées sur le plan de la réglementation avec la loi sur la protection de l’environnement qui entrera en vigueur au moins partiellement au début de 2025. Il sera par exemple plus facile de mettre en place des solutions de branche dans le domaine de l’économie circulaire. Néanmoins, de nombreux obstacles réglementaires subsistent, il faut en particulier agir afin de fixer un prix pour les externalités. Les entreprises ne devraient cependant pas attendre la réglementation, elles devraient déjà appliquer de nouvelles technologies et participer activement à l’élaboration des conditions-cadre (par exemple au travers d’associations comme swisscleantech).
Directeur Institute of Product Development and Production Technologies ZHAW
